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Reconnue bourgeoise de Bex

Une Bellerine dans la tourmente pour une autorisation de séjour durable

Mme Messan Ablavi, de nationalité togolaise, vit en Suisse depuis 1991. Tout au long de ses vingt-deux ans de séjour helvétique, elle n’a eu de cesse que d’encadrer sa famille composée de six enfants, toutes des filles, dans son quotidien. Le résultat au finish est à la hauteur de son investissement: toutes se sont bien intégrées au point d’avoir eu la nationalité suisse au moment de leur demande de naturalisation. Toute la famille? Non, sauf elle. Pourquoi? C’est ce dont le «Point Chablais», au travers de cet article, va tenter de percer le mystère.

 

Messan Ablavi
Messan Ablavi

 

Mme Messan est arrivée en Suisse en 1991 comme indiqué plus haut. Elle a débarqué avec quatre enfants de sexe féminin ainsi que le père de ces dernières. Après leur demande d’asile, ils sont affectés au centre pour requérants d’asile de Bex. Quelque temps après, ils sont envoyés dans un appartement, toujours à Bex. Depuis lors, toute sa vie s’organise dans cette commune qui est devenue la sienne au regard de nombreuses années de résidence. La Togolaise qu’elle était devient peu à peu une Suissesse dans les faits par l’adoption des us et coutumes locaux ainsi que, du reste, toute sa famille.

 

A la fin des années 1990, survient pour elle un drame: le divorce d’avec le père de ses enfants avec qui elle entretient après coup malgré tout des relations courtoises. Elle garde les enfants qu’elle élève seule jusqu’à ce qu’elle rencontre l’homme avec qui elle vit aujourd’hui, qui lui donne deux enfants. Ce qui amène le nombre total de ses filles à six. Sur ce nombre, quatre vivent avec elle dans l’appartement, tandis que les deux aînées évoluent de leurs propres ailes. Aucune d’entr’elles n’a décroché sur le plan scolaire. Ce qui fait que, quand elle sollicite la naturalisation pour sa famille en 2009, quatre de ses six enfants l’obtiennent sans coup férir. Elle, en revanche, doit se «contenter» du titre de bourgeoise de Bex de la part de sa commune. Ce titre essentiellement honorifique ne règle pas pour autant la question relative à son titre de séjour.

 

Cependant, pour obtenir le titre de bourgeois, certains critères doivent être réunis. C’est donc en remplissant ces conditions fondées sur la rectitude morale que Mme Messan Ablavi obtient de temps à autre du travail pour subvenir aux besoins de ses enfants. Mais, disposant d’un permis devant être renouvelé chaque année, il lui est arrivé de perdre également son emploi avec des enfants… suisses. Ici, cette mère de famille est confrontée à un paradoxe vis-à-vis des autorités. D’un côté, selon ses dires, ces dernières lui demandent de trouver un travail pour régulariser sa situation, et, de l’autre, n’ayant pas une autorisation de séjour, elle ne peut trouver du travail, ou, à tout le moins, l’exercer sur une longue période. Conséquence: «… des fins de mois difficiles et une précarité de situation personnelle qui dure depuis vingt-deux ans» ajoute-t-elle avant d’indiquer: «Je suis à bout.»

 

Maman de jour

Cette lassitude face à des lendemains incertains prend encore une tournure plus dramatique avec ce qui lui est arrivé dernièrement. En 2012, elle devient «maman de jour» à Bex. Les conditions d’accueil collectif de jour sont définies par trois textes juridiques. Il s’agit de l’Ordonnance fédérale sur le placement d’enfants (OPE), la Loi du 20 juin 2006 sur l’accueil de jour des enfants (LAJE) et son règlement d’application (RLAJE) du 13 décembre 2006, ainsi que les Directives pour l’accueil de jour des enfants préscolaires et celles pour l’accueil de jour parascolaire.

 

Les conditions d’autorisation définies par la LAJE sont au nombre de huit. C’est après avoir rempli celles-ci que vous êtes reconnue par une structure appropriée comme étant «maman de jour». Ce qui vous donne le droit de pouvoir exercer en toute légalité une telle activité. Un rapide coup d’œil sur les critères permet de constater que Mme Messan Ablavi les remplit toutes. Y compris celle relative «… à la nationalité suisse ou au bénéfice d’un permis C, d’un permis B ou de toute autre autorisation de résider sur le territoire suisse valable une année au moins». Car, si elle ne dispose pas des trois premiers documents, elle est en possession du dernier sous la forme d’un permis F d’une durée d’une année renouvelable.

 

Contradictions

C’est pour cela, d’ailleurs, que la structure délivrant le statut de «maman de jour» dans la cité saline, l’Association régionale d’action sociale pour le district d’Aigle et le Pays-d’Enhaut (ARASAPE) lui accorde l’autorisation d’exercer pour un an. Mais, ici, les versions divergent pour le renouvellement du …sésame. D’un côté, la Bellerine affirme sur le cœur que l’ARASAPE l’a informé qu’elle ne renouvellera pas le document. Ce qui signifie une perte d’emploi pour elle. Car les «mamans de jour», tout en travaillant à la maison, sont rémunérées pour s’occuper des enfants d’autrui et les leurs. Elles bénéficient en bonne et due forme d’un contrat de travail. Une aubaine pour celle qui veut travailler afin de résoudre son équation de séjour depuis une vingtaine d’années.

 

L’ARASAPE, pour sa part, affirme le contraire. Car l’une de ses deux coordinatrices, Anne-Marie Roduiz Thétaz, explique que «Mme Messan est toujours maman de jour jusqu’à preuve du contraire». Mais à la question de savoir si une décision a été prise pour le non- renouvellement, elle préfère botter en touche en répondant qu’elle est liée par le secret de ses fonctions pour donner son avis.

 

Le fait est que l’autorisation provisoire accordée à Messan Ablavi est valable selon le RLAJE pour dix-huit mois. Mais celle qu’elle aura est définitive pour une durée de cinq ans, même si «…sa validité peut toutefois être limitée dans le temps ou assortie de charges et conditions». Son obtention devrait donc permettre à la Bellerine de pouvoir transformer sa bourgeoisie en naturalisation.

 

Ce qui lui permettra de suivre plus sereinement la scolarité de tous ses enfants, y compris les quatre Suisses, mais aussi sortir du cercle vicieux voulant que «…pas de travail, pas de permis, pas de permis, pas de travail»!

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Article écrit par

Roger Lussamaki

Roger Lussamaki

Journaliste

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